Comment se déroulent nos travaux ?
Les membres décident collégialement en séance plénière du programme de travail annuel. Il est élaboré à partir de sujets proposés par les élus de Rennes Métropole (sollicitation) ou par les membres eux-mêmes (auto-saisine).
Une fois le programme validé, des groupes de travail pilotés par un ou plusieurs membres sont constitués pour répondre aux problématiques posées. La composition (membres, partenaires extérieurs…), la méthodologie (diagnostic, démarche prospective…) et les moyens (groupe-projet, débat, outils numériques…) sont adaptés à chaque problématique. L'équipe technique facilite le travail des groupes.
Les avis et contributions des membres sont ensuite transmis aux élus locaux de façon à enrichir les politiques publiques métropolitaines. Les acteurs locaux peuvent aussi s'emparer des préconisations proposées pour impulser des actions et des expérimentations sur le territoire.
Les travaux en cours portent sur la transition climatique, les migrations, et les précarités des jeunes (voir le programme 2024 du codev).
Nos travaux
TitreProjet "Séniors, et alors ?!" – Le projet "Un avenir après le travail", porté par l'ARESAT de BretagneMots clésvieillissement, séniors, accompagnement, handicap, retraîte, coopération, ainés
vieillissement, séniors, accompagnement, handicap, retraîte, coopération, ainés
Le collectif « seniors, et alors ?! » du Codev souhaite contribuer à la réflexion des élus métropolitains et municipaux sur le vieillissement, en relayant des besoins, réalisations, manques, leviers pour demain, et projets inspirants. D’ici juin 2021, le Codev s’intéresse plus particulièrement à ce qui touche à l’habitat, au « chez soi ».
Entretien avec M. Gwenael Planchin, Responsable du Projet « Un Avenir après le Travail » et formateur à l’ARESAT (association régionale des ESAT - établissements et services d’aide par le travail – de Bretagne)
Pouvez-vous nous résumer le lien entre l’action de l’ARESAT et les problématiques qui intéressent le collectif « Séniors, et alors ?! » ?
L’ARESAT (association régionale des ESAT de bretagne) représente un secteur du champ médico-social, les ESAT (Établissements et services d'aide par le travail) , qui rendent possible l’accès au travail aux personnes orientées par la MDPH (Maison départementale des personnes handicapées). Lorsqu’elles arrivent en retraite, les personnes handicapées quittent le monde du handicap, le champ du « travail protégé », pour entrer dans le droit commun. Il y a des fossés entre les deux mondes. La retraite est une transition délicate pour tout salarié. Force est de constater que les personnes en situation de handicap viennent éclairer de manière assez forte les besoins de tout un chacun.
L’ARESAT participe au gérontopôle Kozh Ensemble (voir entretien avec Pierre Grimaud, Cress Bretagne prochainement en ligne ) autour du projet « un avenir après le travail », qui a pu être perçu par les fondateurs du réseau breton comme un mini gérontopôle spécialisé.
L’ARESAT a été créée dans les années 2000 autour de la reconnaissance des acquis de l’expérience professionnelle. Comment reconnaitre les compétences de tout-un-chacun quand l’accès à un diplôme est avant tout "sanctionnant" ? L’ARESAT Bretagne a créé le dispositif « Différent et Compétent » présent dans plus de 800 ESAT en France. Nous sommes dans la logique que l’on apprend tout au long de la vie. C’est tout naturellement alors qu’un des adhérents de l’ARESAT a proposé il y a 10 ans de travailler sur la retraite, avec en éléments de contexte des difficultés propres aux personnes en situation de handicap, et une courbe exponentielle de l’avancée en âge en ESAT sur les dix années à venir. Nous y sommes ! L’IGAS rapportait en 2019 que 44% des publics en ESAT avaient plus de 50 ans.
Deux explications à cette augmentation brutale, dans ces établissements, les personnes retardent au maximum leur départ en retraite, faute de perspectives et de confiance, alors qu’elles peuvent prétendre pour 70 à 80 % d’entre elles à partir dès 55 ans. Autre réalité : Actuellement, une admission sur deux en ESAT concerne des personnes âgées de plus de 50 ans, ayant pour certaines une RQTH (reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé …) depuis longtemps. Pour autant, leur fatigabilité et l’augmentation des exigences de production, les éloignent de l’entreprise classique.
« Un Avenir après le Travail » s’est construit par étapes En 2010, 2011, nous avons partagé la réalité des premiers retraités et créé des laboratoire d’idées. 4 thématiques de travail sont remontées :
- droit et ressources
- logement et accompagnement
- vie sociale
- santé
Ce sont plus globalement les 4 thématiques importantes du bien vieillir.
Sur ce projet « un avenir après le travail », l’ARESAT a eu le soutien des caisses de retraite complémentaire, et a pu développer le dispositif sur la région Bretagne à partir de 2014. En 2017, la CNSA (Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie) a soutenu la dernière phase du projet pour son essaimage dans 8 régions qui développent aujourd’hui « un avenir après le travail ». Cela représente environ 300 ESAT. L’ARESAT a repris à son compte l’animation de la région Bretagne.
Et concernant le volet « personnes en situation de handicap en entreprise » ?
C’est l’environnement qui met les personnes en situation de handicap. Dès lors qu’on va développer l’accessibilité dans l’environnement, les personnes sont plus autonomes.
L’interlocuteur principal dans l’environnement hors ESAT, cela va être les CLIC.
Nous ne sommes pas dans un dispositif qui va orienter dans une direction fléchée handicap / non-handicap. Nous sommes un dispositif qui prépare la retraite, en mobilisant les acteurs de droit commun. Nous tentons, dans le cadre des 22 animations de territoire actuelles en Bretagne, de limiter les obstacles, de rendre le plus accessible possible les ressources locales, afin qu’elles deviennent le plus inclusives possible. A termes cela bénéficie à toute personne limitée dans son autonomie de par son âge.
Si nous raisonnons sur Rennes Métropole, sur la convention CLIC / Conseil départemental / MDPH, on considère que 10% des personnes sont en situation de handicap. Avez-vous des éléments statistiques là-dessus ?
Sur la question des chiffres, nous nous sommes rendu compte d’une grande difficulté des pouvoirs publics à avoir des chiffres réels. Nous faisons des projections à partir des effectifs et leur âge en ESAT.
Les personnes en ESAT peuvent partir à 55 ans et l’ESAT peut les mettre à la retraite à 70 ans. Nous avons donc un delta de 15 ans pour lequel le départ est possible. Les projections sont donc très relatives. Nous sommes très preneurs de tout élément démographique. Nous avons des études sur les ESAT. Je peux avoir les extraits sur les 11 ESAT du pays de Rennes, mais ils datent de 2017. Il y a une certaine réticence de nos tutelles à partager ces éléments. Ça devrait être pourtant de la donnée publique. C’est une des difficultés.
Nous n’avons aucun élément quantitatif sur les retraités sortis des ESAT.
Est-ce que des filières de « spécialisation » vont suivre dans les formes d’habitat, ou vont-ils être dans le droit commun ? Et concernant l’accompagnement individuel, y a-t-il peut être des mesures particulières à prendre en terme de formation des professionnels ?
Vous parliez de « filières », nous luttons contre ça. Nous avons un parti pris : arrêtons cette logique de filières. Si on regarde la retraite au regard des organisations, on a un effet filière. Si on regarde la retraite au niveau des personnes, on arrive sur de l’animation de territoire. Afin qu’elles puissent trouver autours d’elles les ressources, différentes et modulaires, qui vont leur permettre de construire leur projet de retraite participative et inclusive. Nous sommes d’abord en amont, en préparation, de manière très anticipée. Ça bouscule dans les organisations. La retraite, ce n’est pas un an avant, et juste en remplissant un dossier. Il y a beaucoup de représentations sur la préparation de la retraite qui agissent comme des freins à l’anticipation.
Un directeur d’ESAT arrivant en retraite me disait « je suis en train de découvrir que l’on vit sa retraite comme on vit sa vie ». Si on est déjà bénévole, connecté avec le CLIC, avec l’aide à domicile, la retraite c’est une transition douce. Si on vit la retraite comme l’arrêt du travail, on court à des situations très mal préparées et compliquées.
Nous savons la grande inquiétude des parents ayant un enfant en ESAT : que va-t-il faire de ses journées à 60 ans dans un appartement à la retraite ?
Effectivement. Il y a des difficultés administratives, par exemple dans des CLIC hors Ille-et-Vilaine, qui ne prennent en charge qu’au-dessus de 60 ans, puis n’orientent pas les retraités d’ESAT…
Il faut prôner des partenariats entre retraités et futurs retraités, ESAT, et dispositifs de droit commun.
Il faut s’assurer que les personnes ne se retrouvent à la retraite dans leur coin.
La mutualisation des actions entre associations et autres structures intervenantes est importante. A la retraite, les personnes ne sont plus de l’Adapei, ou des Ajoncs d’or ! Nous n’avons un partenariat avec la CARSAT (Caisse d'assurance retraite et de la santé au travail) que parce que nous travaillons en lien entre les 86 ESAT de Bretagne. Si chaque ESAT venait voir la CARSAT, ce ne serait pas possible. Cela nous permet ensuite de travailler sur l’accessibilité de leur information.
Le projet « Un avenir après le travail »
Voir diaporama ci-dessous
4 thématiques :
- droit et ressources : Connaitre ses droit à la retraite, anticiper ses ressources financières
- logement et accompagnement : Évaluer ses besoins et découvrir des réponses multiformes
- vie sociale
- santé : Être et rester acteur
Un constat : des adaptations à la marge peuvent souvent améliorer nettement les situations.
Les essentiels :
- Être informé·e pour connaître, choisir et décider
- Créer des synergies locales pour favoriser un environnement inclusif
- Former les structures de travail pour identifier les enjeux et les ressources
- Développer des initiatives coopératives et innovantes. Les capitaliser pour permettre leur enrichissement permanent.
Les outils développés par le dispositif :
- Depuis 2014, formation de 250 animateurs retraite actifs sur les territoires
- 500 pourront être formés en 2 ans grâce au soutien de Malakoff-Humanis
Des parcours d’animation de territoire en lien avec des animateurs locaux :
- réunir les retraités d’un même territoire
- voir comment ils voient la retraite
- construire ce parcours avec eux et avec les organisations
- en partenariat avec les différents acteurs locaux de la retraite, de la gérontologie, de la vie sociale, de l’habitat et de la santé.
Cela se décline par :
- des entretiens conseils individualisés avec les caisses de retraite pour reconstituer sa carrière, faire des projections en termes de droits…
- des visites de différents lieux : « je ne sais pas ce qui est bien pour toi, mais je sais ce qui existe sur le territoire, je vais te les montrer et tu me diras si ça te parle ». Des personnes ont découvert des format d’habitat qu’il n’imaginaient pas, et qui leur ont plu..
- des rencontres d'associations locales, de clubs de retraités, de fédérations, France Bénévolat, … et construire des passerelles (formations des accueillants, promotion dans les ESAT, accompagnants bénévoles…
- une participation à des actions de prévention santé destinées aux séniors, être en lien avec des dispositifs permettant d’être en veille sur sa santé (centres d’examens de santé, …).
Nous travaillons avec des bailleurs sociaux : deux exemples
- Avec Rennes Métropole Habitat, sur les besoins de Rennes Métropole…. Le besoin très majoritaire : un habitat favorable aux séniors, d'où la nécessité d’identification des quartiers favorables aux séniors.
- Sur Lorient, le bailleur a imaginé des services de conciergerie par quartier, où on peut aller chercher de l’orientation et des services.
Sur la vie sociale, nous sommes amenés à former les acteurs associatifs à l’accueil des personnes en situation de handicap. Je cite par exemple l’office des retraités de Brest qui est passé de 1 à 20 retraités d’ESAT. Nous avons formé à l’accueil bienveillant et durable de tout un chacun, pas uniquement sur la question des personnes en situation de handicap. Nous avons pris l’angle de la situation de handicap et avons travaillé ensemble à l’accessibilité universelle.
Les acteurs sont désormais très sécurisés par rapport à ce public. Un animateur retraite de l’ARESAT peut intervenir en ressource si besoin.
En Ille-et-Vilaine, sur Rennes, l’action « handicap engagement » avec France Bénévolat a diffusé à l’échelle nationale. Souvent on recherche des bénévoles pour aller au-devant des personnes en situation de handicap, alors que celles-ci peuvent être une ressource. France bénévolat recrute des bénévoles accompagnateurs au bénévolat de personnes en situation de handicap, pour appuyer le bénévolat dans des associations « classiques ».
Nous souhaitons accéder aux formations de prévention, via la conférence des financeurs. Cette instance est assez exemplaire en Ille-et-Vilaine. Nous avons également réfléchi avec le Département sur « comment ils peuvent être un levier » sans que cela ne leur coûte. Par exemple, ils ont inscrit un critère de prise en compte des personnes de situation de handicap, qui fait que le dossier passe en priorité à la conférence des financeurs.
Autre exemple, les 3 CLIC antenne MPDH du département étaient partant sur un projet, mais pas le CLIC Rennes car non habilité « Handicap ». Ce sont des obstacles « naturels » ; il faut néanmoins tâcher de créer des écosystèmes facilitants, sans que cela ait un coût extraordinaire.
Les familles sont-elles inclues dans toutes les étapes du parcours ?
Comme ce sont des animations de territoire, les formats sont ouverts, ça ne se passe plus uniquement dans l’établissement. Les animations de territoires, c’est créer un écosystème « naturel », sortir d’une notion de prise en charge à une notion de prise en compte. Avant de travailler à l’ARESAT sur ce projet, J’étais coordinateur d’un SAVS (Service d'accompagnement à la vie sociale), pour accompagner « les personnes ». Mais lorsqu'on amène les personnes quelque part, ça ne prend pas. Il faut d’abord accompagner les environnements, une fois qu’ils sont ouverts les personnes viennent, ça se fait naturellement. Nous créons une forme de débroussaillage. Cette idée qu’une réponse adaptée existe sur le territoire, ça rassure tout le monde, les familles également.
Le langage sur la retraite peut être très perturbant. Le terme « petite mort » par exemple, c’est extrêmement violent…
En breton, lorsqu’on traduit « la retraite », ce n’est pas partir, c’est « arriver » en retraite. Il y a un aboutissement, c’est valorisant, on arrive quelque part. C’est ce qui nous anime, et pour arriver quelque part, il faut que l’on soit accueillis, et préparés. La retraite crée de la dépressurisation. Sauf qu’entre la dépressurisation et la dépression, la bascule est subtile et vicieuse… On parlera donc plutôt d’une préparation à la retraite au long cours, pour qu’à la fin je n’ai plus que le travail à lâcher.
Voir le film sur France 3 Bretagne : Devenir bénévole après le travail - une initiative du collectif rennais
Un mot pour conclure ?
Sur le projet « un avenir après le travail », nous ne souhaitons pas être spécialisés. Nous avons envie d’en faire un outil de droit commun. Souhaitons qu’« un avenir après le travail » puisse être un outil pour tous.
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